Je suis Fabrice Métayer, né le 7 janvier 1976 en Charente.
Mon père et ma mère sont agriculteur et agricultrice dans le sud de la Charente sur une petite ferme en polyculture élevage (céréales, oléagineux, porcs, poulets).
J’ai vécu en citadin depuis que j’ai quitté la ferme familiale, c’est à dire depuis mon entrée au lycée (à Angoulême). Ensuite, ça a été, à Toulouse puis Marseille, les années de fac et les premiers boulots. En vrac : des études d’histoire à la fac de lettre de Toulouse, au Mirail, la lutte contre le tunnel du Somport, les actions de Planète en danger, le « printemps » de Décembre 95, un petit boulot passionnant dans une librairie dédiée à la mer près du Vieux-port à Marseille, une maîtrise et un DEA consacrés à l’histoire du fait colonial à travers l’étude de trajectoires d’acteurs de la colonisation française en Afrique, du volontariat puis trois ans de coordination d’un projet à AIDES, association de santé communautaire, et encore d’autres activités militantes, dans le mouvement altermondialiste.
En l’espace de quelques mois, j’ai mûri le projet de devenir à mon tour paysan. La décision de donner une autre direction à ma vie a été assez rapide, fin août 2006, de retour de trois semaines de vacances itinérantes en vélo dans le nord du Portugal. Après avoir roulé au milieu d’une nature savamment aménagée et entretenue par un peuple de paysans-jardiniers, le retour en ville a constitué un choc : ce n’était plus possible de continuer comme ça. Je retrouve alors un sens à perpétuer cette collaboration étroite avec la nature qui constituait l’activité principale de mes ancêtres charentais, poitevins et vendéens. Mais sans rompre avec le monde urbain, en essayant de l’associer le plus possible à ce projet. Depuis quelques années, des paysans et paysannes qui se revendiquent comme tels, issus de la Conf’, ont déjà ouvert un sillon dans ce sens, en venant au cœur de Marseille, à l’emplacement de l’ancien « Ventre » de la ville, proposer une relation directe entre producteurs et consommateurs. Je n’ai qu’à essayer de les suivre ! Les romans de Jack London célébrant le retour à la terre (Radieuse Aurore et La Vallée de la lune principalement), les idées de Carlo Petrini, Wendell Berry et Murray Bookchin ont accompagné la réflexion qui a abouti à cette décision. Mais je suis sûr que de nombreuses autres raisons et déraisons ont contribué de manière souterraine à cette volonté de retour aux racines.
Je n’étais pas seul dans ce projet : ma compagne, Sandrine, bien que désirant rester prof des écoles, m’encourage et se rêve aussi en paysanne accomplie.
Et puis il y a toutes les personnes à qui j’en parle autour de moi. Beaucoup expriment de l’intérêt à suivre mon bout de chemin, alors je leur propose ce blog, outil pour partager facilement, en abolissant le temps et l’espace. Mais rien ne remplacera une rencontre autour d’une table bien garnie.
En parlant de manger, je pense que ça pourrait être une des clés pour inviter le plus grand nombre à participer à ce projet : n’est-ce pas l’une des actions les plus élémentaires et à la fois culturelles de notre existence ? Et comme le résume si bien un autre paysan, « manger est un acte agricole » (Wendell Berry, « The Pleasures of Eating »).
Depuis, je me suis formé (un BPREA à Aix-Valabre), j’ai rencontré de nombreux paysans maraîchers de la région marseillaise chez qui j’ai aussi fait des stages (notamment Jérôme Laplane à Roquevaire) et finalement Je me suis installé début 2009 avec deux associées, Régine et Valérie, rencontrées au BPREA, à Lauris. Nous y avons créé, sur une friche agricole de 4 ha, le GAEC Les Jardins de l’escapade, une petite ferme produisant tout au long de l’année légumes, fruits et œufs, en respectant le cahier des charges de l’Agriculture biologique. Produits que nous proposons notamment aux Marseillais au cours d’un marché au cœur de la ville, deux fois par semaine. Et la boucle est bouclée !
Voilà quatre ans que je suis paysan à Lauris et une autre boucle devrait se boucler d’ici l’an prochain : j’ai le projet de continuer mon activité mais dans le sud-ouest. C’est également un projet de vie pour notre petite famille et nous recherchons actuellement un point de chute, notre vallée dans la lune, afin de développer pleinement notre projet d’installation à la campagne basée sur une agriculture paysanne et écologique.
« Nous devons créer une société écologique, non simplement parce qu’elle est souhaitable mais parce qu’elle est tragiquement nécessaire. Il nous faut commencer à vivre si nous voulons survivre. »
(Murray Bookchin, Pour une société écologique, 1974)